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mercredi 16 septembre 2009

Etranger au paradis

« Le monde pourtant si vieux et si usé de votre existence redevient aussi vivifiant que cette eau qui vous traverse. Le gargouillement se prolonge, fibre après fibre, muscle après muscle organe après organe dans un gigantesque réseau de tuyauterie interne. Et chaque fois que l’eau rafraîchit votre corps, le rituel s’installe. Cette expérience unique et quotidienne fait sourdre de lointains souvenirs. Des souvenirs qui dévoilent un monde neuf. Un monde que vous avez connu il y a très longtemps. »
Extrait du livre

LA VIE…


Le narrateur nous conte la vie : ses stades, son évolution, de sa naissance à sa fin, de sa croissance à sa dispersion, mais sans vraiment passer par une logique qui tend du rien à l’éternité, de son début à sa finalité. En tout cas, c’est ce que l’on imagine au commencement, en tout début de lecture. Le narrateur passe du présent au passé, du passé au présent sans penser au futur. En a-t-il encore un ?

Dans les premières pages, on se demande, on s’interroge, on se questionne puis, on comprend vite le sens donné : « Vous progressez à coups de fouet réguliers, l’euphorie d’une victoire proche vous fait oublier par moments l’intense fatigue qui se prolonge. Heureusement les rangs des autres voyageurs s’éclaircissent. […] Vous croisez de plus en plus de petits frères immobiles. Certains ont l’air de dormir […] Maintenant des milliers de cadavres jonchent le sol ou du moins ce qui en tient lieu. » On comprend qu’il nous parle de l’avant-naissance. Ce périple dont aucun de nous ne se souvient mais qu’on a tous traversé. On pense connaître l’avancée pour en avoir entendu parler par ici, lu des articles par-là. Le détail est bien expliqué, avec parfois un peu d’humour.

Ensuite, on poursuit la lecture avidement. On plonge dans la décrépitude de l’être comme on plonge dans les pages aux mots bien écrits, joliment employés. On plonge vers ce qui nous semble être une fin ou qui lui ressemble, s’en approche : « Cette forme beige et parcheminée, c’est vous. Vous ne savez pas ce que vous faites là. Vous avez oublié. Vous ne savez même plus qui vous êtes, un vieillard, une femme, un enfant. Vous paraissez vieux. […] Votre peau est aussi jaune que vos ongles, votre bras est flasque, privé de muscles, couvert de poils blancs. »

Puis, vient l’âge de la petite enfance. La toute petite avec son lot de souvenirs, pas toujours gais certes, pas toujours tendres non plus. Les premiers sentiments aussi sont là, ils affluent. Ceux qui secouent le ventre sans douceur, mais sans douleur non plus, « expérience unique en son genre : vous venez de faire connaissance avec votre estomac et avec votre premier amour d’enfant. Un moi et un émoi face à face. »

LES SOUVENIRS…


S’ensuit, l’heure d’un grand malheur, l’orphelinat, les années d’école entre des murs gris, les copains et le meilleur ami avec qui on fait les premières bêtises puis les suivantes, parfois même les pires. Les premières amours et le premier baiser, pas forcément savoureux : « Une langue pénètre votre bouche. Elle sent le chlore. La langue bute contre votre langue, tapote votre palais, fouille vos prémolaires. Elle vous envahit comme un bâillon râpeux et joueur. Vous respirez par le nez de plus en plus fort. […] Vous vous devez d’être à la hauteur. »

Alors, le vieillard réapparaît comme c’est le cas tout au long du livre. Sa vie remuante d’antan, celle, présente, inerte ou presque. Le narrateur vous parle. Il a besoin d’une oreille attentive, c’est la votre qu’il trouve. Il vous raconte et vous vous laissez emporter par son timbre que vous imaginez épuisé mais bas et doux tout de même. Il ne cache rien, faisant de vous son confident, son ami, peut-être le dernier. Vous vous laissez séduire à être ce dernier ami. L’homme est seul la plupart du temps, sauf vers la fin où une présence autre que la votre va lui redonner quelques plaisirs difficiles à réaliser mais avec une bonne aide, parfois artificielle, tout est réalisable finalement.

Le narrateur nous parle du temps et de ses années en tous genres « de l’autre siècle, les premiers temps de la jeunesse en tant que miroir du monde. Bientôt d’ailleurs le monde va se libérer […] Ce sera le temps nouveau de la liberté d’expression pour tous et de la permissivité pour chacun. »

Ce livre se lit vite tant nous sommes pris entre le désir de comprendre le sens et celui de simplement en découvrir la suite. La lecture se fait fluide et nous emporte au gré de ce vieillard et de ses souvenirs. Est-ce cela la fin ? Se souvenir du début, de l’enfance, puis de l’adulte que nous avons été ? A cette heure, proche de la fin, certains événements reviennent plus que d’autres, des sourires, des bonheurs, des peines…


Un prix qui reste correct pour ce roman sympathique et dont le format reste facilement transportable.
La couverture en papier-carton donne l’impression agréable qu’on a en main un livre ancien.

Marie BARRILLON

Informations sur le livre :

Titre : Etranger au paradis
Auteur : Philippe Lafitte
Editions : Buchet Chastel
ISBN 13 : 9782283022238
Prix : 13,00 euros
Diffusion Seuil ISBN 2283022231

Chronique de Fattorius, ici : Etranger au paradis

3 commentaires:

  1. Une bonne lecture pour moi aussi! J'en parle justement ce soir sur mon blog:

    http://fattorius.blogspot.ch/2017/05/du-spermatozoide-la-derniere-nuit-une.html

    Et cela m'a permis de découvrir le vôtre; je vais prendre le temps de le feuilleter. Bonne soirée!

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    1. Je ne manquerai pas d'aller voir votre lien.
      Au plaisir DF.

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    2. Merci pour votre attention! Celle-ci m'honore.
      A bientôt donc!

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